lundi 17 mars 2014

Errare humanum est, perseverare diabolicum

 L'incipit du célèbre "Voyage" de Céline est la porte ouverte à tous les délires
 
 
 
 
 
Ça a débuté comme ça. Moi j'avais jamais rien dit. Rien.
Faut dire qu'au début j'avais personne à qui parler et puis Lui, Il était pas bavard, “Très occupé à créer Ses choses” comme Il disait, en priant Dieu sait qui pour que ça fonctionne.
Il avait commencé par faire un ciel et puis une Terre, un machin informe, vide et froid avant qu'il modernise tout ça et se décide à y mette la Lumière.
Là dessus j'avais rien à redire sauf que sa foutue minuterie jour-nuit, le matin et le soir chaque jour que Dieu fait, c'est d'une monotonie...
“Nous vous devons plus que la lumière!”. C'est Lui qu'a inventé ce slogan et d'ailleurs Il s'est pas arrêté là.
 
Quand Il a fait le sec et le mouillé j'ai compris qu'on allait morfler grave, chose dont les poissons n'ont heureusement pas conscience mais qu'un lardon d'un mois découvre avec horreur et sa première Pampers.
Et puis Il a fait la verdure, l'herbe, le cannabis et les légumes en bas - bien trop bas - et les fruits en haut - bien trop hauts - sauf la pomme qui était bien trop basse mais pas plus Lui que moi ne pouvions imaginer la suite... les pesticides, les quotas, les cinq fruits et légumes par jour, l'empreinte écologique et tant d'autres salades.
Si j'avais su tout ça je lui aurais parlé, Bon Dieu!
 
C'est pareil quand Il a créé les zanimaux, les petits et les gros, le bétail, les reptiles et les piafs, les machins à deux pattes, à quatre pattes et plus et qu'Il leur a dit “Soyez féconds! Multipliez vous!”.
Ca s'est mis à fort-niquer à tout va dans un tel vacarme qu'Il m'aurait pas entendu si j'avais ouvert ma gueule.
Qui aurait cru à l'époque qu'on en boufferait du zanimau sans trop savoir de la crêche qui du boeuf ou de l'âne on vient de bouffer?
 
Et dans ce tohu-bohu il a pas pu s'empêcher de crier:”Faisons l'homme à notre image, et qu'il domine tout ce foutoir”, et là j'ai réalisé que je pouvais plus me taire.
Alors j'ai hurlé, enfin j'ai essayé parce que des ornithorynques, des aye-aye, des zaglossus et des velociraptors qui niquent, ça fait un ramdam que je vous raconte pas!
Avant qu'Il ait fini d'insuffler un souffle de vie dans ce petit tas de poussière qu'on appelle homme et qu'il en tire l'autre créature, j'ai réalisé qu'Il venait du même coup d'inventer le pétrin!
J'ai hurlé “STOOOOP!!” mais c'était déjà trop tard.
Les deux candidats au bonheur éternel lorgnaient déjà sur l'arbre du jardin d'Eden.
A l'époque je savais pas faire la différence entre un figuier et un pommier mais qu'est ce que ça aurait changé au bout du compte?
Et ces deux-là qui minaudaient... “On appelera le premier, Caïn”.
“Oh oui, et pour le suivant j'aimerais bien Caha!”.
 
J'ai essayé de Le convaincre de défaire ce qu'Il avait fait mais soit Il était sourd comme un pot, soit Il avait pas encore créé la marche arrière.
Et puis je crois qu'Il avait pas envie de m'écouter.
C'est à cet instant que - foutu pour foutu - j'ai décidé de me laisser pousser des cornes.
J'ai ajouté des sabots fourchus, une longue queue et une bonne odeur de bouc bien fétide.
Ça pouvait pas finir autrement que comme ça. Moi j'avais plus rien à dire. Rien.
 
 

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