samedi 26 novembre 2016

A notre dérive !

Publié sur MilEtUne










Dans l'euphorie générale la chef de cabine annonça le survol du Planchón-Peteroa, un volcan actif de la cordillère des Andes.
Depuis le décollage du vol 571 à Montevideo on marchait à la grappa et à l'alcool de canne... alors le volcan – pensez-donc – on l'avait surtout dans le gosier et le commandant de bord aussi.
“Pas d'malaise” annonça la chef de cabine “le commandant navigue à l'estime... il a le compas dans l'oeil et le tachymètre dans l'autre!”
A côté de moi Germaine serrait les fesses comme tous ceux pour qui ont connu leur baptême de l'air.
Elle se faisait une joie de ce voyage, elle m'avait tellement bassiné avec son Santiago du Chili con carne!
“On est pas un peu bas?” demanda t-elle à un stewart de passage.
“Vous devriez redresser votre siège” lui dit-il sur le ton monocorde qu'adoptent tous les stewarts de passage.
Germaine balisait :”Je suis pas sûre que relever mon siège nous fasse voler plus haut”.
“C'est juste une procédure au cas où” répliqua en passant le stewart de passage.
Germaine avait blêmi malgré la grappa et l'alcool de canne :”Au cas où quoi??”
Déjà une hôtesse titubante distribuait une nouvelle tournée de grappa.
Une fois passée la couche de nuages le sommet du Planchón-Peteroa approchait de nous ou le contraire, ce qui revenait au même.
Au fond du zinc une équipe de rugby dopée à la grappa déconnait à plein tube en plaquant les hôtesses.
Comme on commençait à descendre il y eut une grosse vibration sur l'aile gauche.
“C'était notre aile“ fit remarquer Germaine en grinçant des dents alors qu'un premier pic rocheux arrachait un bout d'aile.
“Pas d'malaise” bredouilla la chef de cabine “avec un peu de chance la dérive n'a pas été touchée”
Germaine eut un hoquet avant de vomir : “C'est important la dérive ?“
Comme j'ignorais à quoi ça servait je levai mon verre de grappa histoire de faire diversion “A notre dérive !” mais le cœur n'y était pas.

Un second sommet de glacier arracha l'aile droite dans un craquement sinistre.
Je tentai de rassurer Germaine :”Au moins la droite... c'est pas la nôtre”
“Pas d'souci” cria la chef de cabine “il nous reste le fuselage, nous devrions nous poser très rapidement”
Germaine pleurnichait : “C'est important le fuselage ?“
“C'est là où nous sommes“ lui dis-je d'une voix rassurante « alors c'est déjà ça»

Effectivement on se planta après une longue glissade sur un glacier à 3600 mètres d'altitude dans un paysage à couper le souffle... alors forcément on eut le souffle coupé.
Il était midi et moi j'avais l'estomac qui gargouillait... on allait pas tarder à bouffer !



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